Le Ministère de la Mer vient de publier un arrêté imposant la pose de pingers sur 80 chalutiers à partir du 1er janvier 2021 dans le but annoncé de limiter les captures de dauphins. Sea Shepherd salue la prise de conscience du Ministère de la Mer qui affirme ouvertement la nécessité de réformer le secteur de la pêche afin d’en faire une activité plus durable et plus respectueuse du milieu marin dans un contexte où les captures de dauphins par les engins de pêche ne cessent d’augmenter sur la façade atlantique française. La situation devient si alarmante que la Commission Européenne a mis la France en demeure de prendre des dispositions d’urgence pour enrayer l’hécatombe de cette espèce protégée.

Si ce constat dramatique est désormais largement partagé, le Ministère reste pour l’instant dans la pure déclaration d’intention et refuse d’imposer les mesures véritablement efficaces évoquées par les scientifiques pour limiter les captures d’espèces protégées, à commencer par les dauphins.

Le Ministère semble vouloir faire des pingers la pierre angulaire de sa stratégie or il s’agit de dispositifs de répulsion acoustique qui visent à exclure les dauphins de leur zone de nourrissage, la même zone qui est occupée par les chalutiers pélagiques et de nombreux autres bateaux de pêche.

Une pose à grande échelle de pingers constitue un problème de survie pour les dauphins qui se retrouvent exclus de leur zone de vie.

À petite échelle, des effets contre productifs ont aussi été notés, le fameux “Dinner Bell effect”, ou phénomène d’accoutumance qui conduit les dauphins à braver la pollution sonore induite par les pingers qu’ils ont identifiés comme des indicateurs de la présence de filets de pêche, et donc de nourriture.

Ces derniers se retrouvent alors piégés dans les filets comme nos équipes ont pu le constater et le filmer l’hiver dernier. En l’occurrence, sur les images filmées l’hiver dernier dans le Golfe de Gascogne, paire de chalutiers, Jérémy Simon et Prométhée, équipés de pingers capturent malgré tout un dauphin. Cette paire a été filmée trois années consécutives par nos équipes avec des dauphins dans son chalut.

Par ailleurs, le niveau de décibels des pingers excède les limitations légales en matière d’harcèlement sonore d’espèces protégées.

Pour toutes ces raisons, Sea Shepherd dépose dès ce week-end, un recours devant le Conseil d’Etat contre cet arrêté.

En outre, nous interpellons le Ministère sur la nécessaire mise en place de mesures sérieuses recommandées par les scientifiques pour enrayer l’hécatombe de dauphins que nous connaissons. Qu’en est-il des caméras imposées à bord des navires pour documenter les captures, à l’instar des modèles australiens ou danois ? Qu’en est-il également des fermetures spatio-temporelles des zones sensibles demandées par les scientifiques ?

Nous attendons également de savoir quelles mesures vont être prises afin de s’assurer que les pêcheurs respectent enfin l’obligation légale de déclaration de captures de dauphins. En effet, en 2019 sur plus de 10 000 captures estimées par les scientifiques sur la base des cadavres mutilés échoués sur les plages, moins d’une dizaine de déclarations ont été enregistrées.

L’urgence pour enrayer les captures est de lever l’opacité sur le secteur et d’exclure les méthodes de pêche non sélectives des zones sensibles comme le Golfe de Gascogne. Les pêcheurs et le Ministère doivent de toute urgence améliorer la transparence du secteur et sa conversion vers des méthodes de pêche, plus sélectives et durables.

En aucun cas, le déploiement de pingers ne constitue une solution crédible et il ne saurait servir de démonstration d’un quelconque engagement sérieux du Gouvernement français à réduire les captures de dauphins dans le Golfe de Gascogne.